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A moto au pays du Porto.
Écrit par Chrise&Semeac   

 La traversée de l’Espagne n’a été qu’une formalité, avec toutefois une nuit à Miranda de Ebro pour un démarrage du séjour en douceur. Nous passons la frontière entre l’Espagne et le Portugal à Fuentes de Onoro. Après la frontière il y a une zone de no man’s land pelée et parsemée de roches sombres sur un sol tout aussi sombre, que des bouquets de genêts blancs, en fleurs en cette saison, constellent cette noirceur comme les étoiles le font dans un ciel de nuit d’été.

La voie rapide porte le nom d'IP5. Il n'y a presque personne, rendant les lieux encore plus sauvages. Et bientôt, quelque chose m'intrigue: régulièrement, on passe sous de grands portiques bardés de caméras, précédés par de grandes pancartes où figurent des taxas pour divers véhicules. J'ai pensé aussitôt aux radars-tronçons. Je constate que comme en Espagne les motos sont logées à la même enseigne que les voitures : classe1. On a appris beaucoup plus tard que pour les nouveaux (en vigueur depuis un peu moins de 2 ans) systèmes de péages avec portiques, il faut se rendre dans les bureaux de Postes pour s’acquitter des taxes (super pratique, dixit des Portugais eux-mêmes), mais que pour les touristes, ils ne savent pas trop comment les faire payer. Vu la crise économique sévissant un peu partout et particulièrement au Portugal, je comprends pourquoi sur les routes à péages, je me sentais souvent très seul.

 

 

Nous sommes arrivés tôt à Marvao pour visiter cette place fortifiée, posée sur une hauteur et qui d'après le guide du Routard se dispute avec Monsaraz pour le titre du plus beau village du Portugal. La météo, par rapport à la veille, avait bien changé et les nuages filaient vite dans le ciel. Le GPS m’avait tracé un zig-zag  au plus court dans les ruelles pavées et en pente du village. A chaque virage il fallait  plusieurs manœuvres pour pouvoir passer. Si vous y allez, sachez qu’en prenant la ruelle qui suit les remparts, c’est plus long mais bien plus sécurisant.

 

Tout en haut, le charme de l’hôtel et la chaleur de l’accueil des hôteliers ont vite fait de balayer ce passage inconfortable. De plus, après avoir posé nos affaires, il y avait une trouée de ciel presque bleue qui a permis une visite enthousiasmante. Il n'y avait presque personne en ce mois d’avril, on pouvait se croire les uniques occupants des lieux. Le silence n’était perturbé que par les bruissements du vent. Tout le village est ceint d'une muraille. On peut en faire le tour en suivant le chemin de ronde. Tout le long la vue donne sur les tuiles rouges d'un côté et l'étendue brumeuse de l'autre.

 

Ce mélange de murs blancs et de murs de granit gris donne de la rigueur aux tableaux, de l’ordre et de la netteté, soulignés par l’absence de tout détritus, dans toutes les ruelles qu’on peut emprunter. On pourrait parler de luxe, calme et volupté, on ne se croirait pas dans une ville du sud. Mais derrière beaucoup de façades blanches, il y a des vides effondrés, des silences d'inoccupation, peut-être des affaires immobilières à faire. On croise quelques touristes, silencieux dans l'air cristallin, cherchant à capter avec leurs appareils photos, la magie de l’instant.

 

Je ne sais si une bataille ou quelques sièges se sont produits ici. Le château est intact et il n'y a aucune trace de lutte. les années cependant rongent peu à peu la pierre. Le lieu semble inexpugnable et les sièges pouvaient durer longtemps vu la grandeur du réservoir d’eau sous le château. Dans la plaine, de loin, on peut voir Marvao dressée sur un bout de muraille rocheuse. Sur cette muraille d'où je regarde, je contemple l'immensité tout autour et plus encore tout au loin. Une bien belle halte. En cherchant un restaurant pour le soir, nous nous sommes aperçus qu'au Portugal, ils ne passaient pas à l'heure d'été.

 

 Le lendemain, sur notre route vers le sud du Portugal vers le bout-du-monde de l’Europe du Sud-Ouest, vers le Cabo de Sao Vicente, on traverse l'Alentejo, une grande contrée de collines de chênes lièges et de champs immenses. Evora en est la capitale. Cette ville aurait mérité une visite plus longue. On s’est contenté d'une vision macabre de la Capela dos Ossos et de sa phrase gravée au dessus du porche d’une triste vérité : « Nos os n’attendent ici que les vôtres »

 

 

Vous voyez les Catacombes à Paris, c'est moins grand ici mais c'est plus clean, si on considère la mort comme quelque chose de clean. De grands murs d'os, bien imbriqués qui vous contemplent et que vous contemplez. Vous finissez fatalement par partager la vision du concepteur des lieux, certainement un religieux, sur le caractère éphémère de notre existence. Un squelette suspendu en rajoute encore.

 

On dit des Portugais que c'est un peuple nostalgique. Que la Saudade est vissée en eux. Quand on écoute le Fado, on ne peut en douter. Que ce soit à Lisbonne dans les vieilles rues populaires de l'Alfama ou à Coimbra l'intellectuelle, ce chant, ce cri vous émeut jusqu'au tréfond de l'âme. Le Fado de Coimbra est toujours chanté par un homme drapé dans la traditionnelle cape noire des étudiants de la vieille université.

 

La guitare portugaise à 12 cordes est plus aigrelette que la guitare à 6 cordes. Les 2 ensemble et c'est un récital, mais que dire des voix. Même sans comprendre un mot de Portugais, on en devine la nostalgie des moments passés, le vide des vies déracinées, du temps qui s'enfuit et passe. Partir au hasard de par le vaste monde, plus d'un tiers des Portugais vivent loin de leur pays, couper de la terre d'où on est né, déraciné, on vit toujours dans le regret.

 

Récemment, fin 2011, le Fado a été classé au Patrimoine Immatériel de l'Humanité. Ce que l'on voit et qui voyage au travers des siècles n'est pas plus immortel que les vibrations de nos sens. A l'Unesco aussi, les Fadistes ne laissent pas indifférents. Dans une soirée, dans l'intimité d'un groupe restreint, nimbée d'une demi obscurité, écoutez  le fado sublimé avec une ou deux larmes de Porto et vous saisissez instantanément l'âme Portugaise.

 

En arrivant en Algarve on est saisi par toutes ces fragrances  d'une végétation du sud, quand on passe à côté d'orangers, d'eucalyptus et même de tapis d'herbes de rien du tout. L'Algarve sent bon au printemps. Je me rappelle d'avoir lu sur un forum, une Portugaise vivant dans la banlieue parisienne se souvenir avec nostalgie des petits villages blancs du Portugal. Ils sont là devant mes yeux, sur une petite colline, avec ces petites maisons toutes blanches de chaux, proprettes et agglutinées. Ailleurs, l'habitat est bien plus dispersé. C'est la côte d'Azur portugaise avec ses maisons pour touristes tout au long de sa côte déchiquetée. Et enfin on a vu la mer.

 

En cette saison, les criques ne sont pas la priorité. Tout en bas, c'est vide de monde. En haut, la vieille demeure commence à avoir peur du vide qui depuis un moment se creuse sous sa cour. Les tempêtes d'hiver doivent être terribles. Les langueurs de l'été ont dû laisser bon nombre de bons souvenirs chez ceux qui ont séjourné ici.

Nous faisons halte à Sagres et non loin, sur une pointe se situe la Forteresse. Une bien sinistre bâtisse, tapie au sol, parée à résister à tous les mauvais vents venant de l'Atlantique et à tous les mauvais sorts réservés à ceux qui bravent et ne doutent. On dit que c'est de là qu'Henri le Navigateur scrutait l'immensité bleue et vivait par procuration les épopées hauturières. Il avait l'argent, le nerf de la guerre et les idées. Au retour des grands navigateurs, il avait droit à la primeur des merveilles de l'au-delà, à l'ivresse des senteurs d'épices mais surtout aux rêves éveillés des découvreurs.

Nous sommes à une extrémité de l'Europe, au Cabo Sao Vicente, là où cela commence et là où cela finit. On est aimanté par les remous et les lourds clapots qui sapent le bas des falaises. C'est un autre Finistère qui ici comme là-bas donne aux hommes de folles idées d'aventure, la hardiesse d'aller au bout de l'horizon, là où la mer tombe en cascades, là où finit le monde.

 

La remontée de Sagres vers Lisboa n'apporte rien de particulier. Les forêts d'eucalyptus, on a déjà vu, il faut noter qu'au Portugal, ils deviennent très gros. Sines n'a pas d'attrait et petit à petit après Setubal, on arrive à Cacilhas d'où on peut voir Lisboa située de l'autre côté du Tage. Au loin, on devine le pont Vasco de Gama, le plus grand d'Europe. Le Tage s'étend beaucoup à cet endroit.   

Dans la descente vers le Tage, on pourrait se croire à Rio. Au loin, un Christ rédempteur, gigantesque, les bras ouverts, tourné vers Lisbonne, surplombe le pont du 25 Avril. Lisbonne c'est géant: le plus grand pont d'Europe, le plus grand Christ, que nous réserve la ville? Le pont franchi nous voila arrivés dans la capitale. Attention sur le pont avec une moto, il vaut mieux prendre la voie centrale, parce que sur les 2 autres, le roulage se fait sur des grilles métalliques qui doivent être bien glissantes lorsque le temps est humide. Le pont est à péage comme l'autre pont, celui de Vasco de Gama. Si vous ne voulez pas payer, vous restez en deçà du Tage.

 

L'autre côté du Tage avec, comme tirant le pont, la colossale statue dédiée aux grandes découvertes, face à la statue du Christ écrasée par de gros nuages noirs. En ce mois d'avril, le temps est très perturbé. Soleil et pluie se disputent le terrain. Nous avons sagement investi dans des chapeaux de pluie, vendus par des Chinoises certainement originaires de Macao. Lisbonne n'est pas très étendue. Tous les moyens de transport s'entrecroisent: métro, tram, funiculaires, charrettes, bus à impériale. Tout pour découvrir agréablement la ville.

 

La découverte de Lisbonne peut se faire en Tram.  Vu l'esthétique, ces trams ont un certain âge. L'intérieur est en rapport, avec profusion de bois vernis chaleureux et de grandes manettes aux chromes encore étincelants. On peut à loisir regarder le chauffeur à la manoeuvre. Ces petits trams peinent tous les jours dans les petites ruelles de la vieille ville, frôlant certains murs et certains pas de portes à quelques centimètres seulement. On peut voir souvent les chauffeurs avec des barres de fer nettoyer les rails devant les roues. Même une fois, le nôtre a fait descendre tout le monde parce qu'il n'arrivait pas à ses fins. Une mécanique à taille humaine.

 

Ce n'est pas un moyen de locomotion réservé aux touristes. C'est un vrai moyen de locomotion que prennent couramment les Lisboètes pour leurs déplacements journaliers. C'est plus agréable que le métro parce qu'en plein air, on y fait le plein de sensations et de visions sur la ville. Ceux qui prennent la ligne 28 doivent pester contre les étrangers qui gonflent exagérément  le nombre d'usagers; la ligne 28 passe aux endroits les plus intéressants de la ville, comme certains miradouros.

 

Lisbonne a beaucoup de beaux monuments, j'ai surtout retenu ces magnifiques arènes parce que de dehors, on ne peut soupçonner que ce bâtiment d'inspiration Arabe cache des arènes. Et puis la corrida portugaise n'a rien à voir avec la corrida espagnole: à la fin le taureau n'est pas mis à mort. Un esthétisme en accord avec la vie.

Autour de Lisbonne, il y a  également beaucoup à voir, à Sintra, à Bélem. 2 jours ne suffisent pas. On ne pouvait pas ne pas voir le fameux Monastère des Hiéronymites. L'extérieur peut sembler insignifiant à côté des autres monuments Portugais, l'intérieur vaut vraiment le déplacement. Quand on rentre dans l'église, le regard grimpe admirativement le long de ces colonnes fines et travaillées d'une hauteur inhabituelle, qui ont résisté au terrible tremblement de terre alors qu'à côté tout vacillait.

 

Le cloître en dentelle de pierre devait permettre d'y rester toute une vie à observer jour après jour la foultitude de détails finement sculptés. La couleur chaude de la pierre devait apaiser les tourments des sempiternels questionnements des hôtes de ces lieux. Arriverez vous à trouver la gravure du voilier cinglant pour Macau. Un siècle pour réaliser cela, n'est bien sur pas un siècle de perdu.

 

A Belem, une gracieuse tour est posée au bord du Tage, dans le plus pur style manuélin. Un style qui parle de mer et de coquillages, de bateaux et de cordages, de globe et de mappemonde. A l'intérieur certaines coursives calibrent naturellement la carrure des matelots et dans l'escalier en colimaçon pour grimper tout en haut, deux vigies ne peuvent se croiser.

 

La tour de Belem était initialement dans l'eau, dans le fleuve. Le tremblement de terre de 1755 a modifié le cours de celui ci. Elle ressemble toujours à un navire, amarré au port par une passerelle, la proue tournée vers le large  et toujours prête à prendre la mer pour un dernier voyage. 

 

Les Portugais sont des découvreurs, çà depuis Magellan on le sait. Ne dit on pas où que ce soit dans le monde où vous allez, un Portugais vous a précédé. L’immigration portugaise date de très longtemps. Ce sont aussi de grands décorateurs de bâtiments, on reste un bon moment admiratif devant autant de finesse. L’art manuélin se rencontre partout au Portugal. Ces chef-d'oeuvres se contemplent à Obidos, Batalha, Tomar, Villa Real, Bucaco...Une fenêtre de style manuélin typique au Convento do Cristo

Une gargouille parmi tant d'autres. Parmi elles, il doit bien y avoir un Shrek. Le temps colore la pierre en gris et pourrait faire croire à du granit dur. Les scultures n'en sont pas moins admirables. Le lichen jaune pourrait laisser croire qu'on est quelque part dans une région de Bretagne Sud. 

Escalier aérien en pierre massive  à Tomar. A Tomar, c'est tellement grand et tellement imbriqué qu'on a failli ne pas en sortir. On passait d'une cour à l'autre puis d'une cour à l'autre encore. Quelques 150 chambrées de 4 à 6 places réchauffées par un ingénieux système de conduites d'air chaud intégrées dans les murs. C'était la vie de château.

Au dessus du porche d'entrée au Monastère des Jéronimos. Ce monastère aussi, est immense, aussi richement décoré, comme à Batalha. A Batalha, dans une pièce donnant sur le cloître, bizarrement, il y a la tombe du Soldat Inconnu, veillée par 2 militaires. Lors de la relève, les voûtes résonnent du son d'un pas de marche cadencé.

Couloir ouvert à Bucaco. Combien de coups de burin, combien de coups de marteau pour ouvrager de tels arceaux?

Hôtel 7 étoiles à Bucaco. La technicienne de surface passait la serpillière en uniforme galonné blanc. Dehors jardin à la Française strict, taille au cordeau; petit bassin avec un cygne. Cet hôtel qui était un ancien monastère, se situe dans une forêt avec nombre d'espèces d'arbres exotiques bien sûr ramenées des divers voyages par delà les mers.

 

Les Portugais décorent leurs bâtisses d'Azulejos, que ce soit sur les bâtiments officiels mais également sur de modestes maisons. Vous ne pouvez pas ne pas en voir, il y en a vraiment partout. Leur origine est arabe et au départ uniquement bleu et non figuratif. Dans ce cloître à Tomar, vous ne trouvez pas que cela ressemble à l'intérieur d'un Riad?

Ils recouvrent parfois des façades entières, en bleu, en marron, en vert... s'éloignant de plus en plus de la couleur azul. Au Portugal, les salles de bain sont situées à l'extérieur. Toutes les façades ne sont pas recouvertes; ce n'est pas propre aux vieilles maisons, certaines récentes les arborent et d'autres pas. Je n'ai pas trop saisi la logique.

Plus tard, ils sont devenus figuratifs, de sacrés puzzles, plus grands que nature. Quel travail avant cuisson et après aussi. Avec les azulejos, c'est pratique, on peut décorer et l'extérieur et l'intérieur des demeures.

Des murs entiers, des pans de la vie de tous les jours et des faits marquants de l'histoire. Ici c'est dans le hall de la gare centrale de Porto, de quoi patienter en cas de retard des trains.

Des pans de vie mystique aussi et surtout, et en couleur. La religion tient une place encore importante au Portugal et les églises sont des lieux encore très visités et pas uniquement par les touristes.

A Valega c'est le summum: figuratif et polychrome. A l'extérieur comme à l'intérieur. Pourtant Valega est une toute petite ville. Monsieur le curé d'ici doit être une personnalité. Dans cette profession, comment se fait l'attribution des paroisses?

Comme nous habitons près de Lourdes, notre curiosité comparative nous a poussés jusqu'à Fatima, la rivale. Si Lourdes est restée village,  Fatima se veut la Mecque. Une esplanade immense. Quand tout est rempli, il doit y avoir une vibration prodigieuse. Le lieu où est apparue la Vierge est le point de convergence. Voir des gens en faire le tour à genoux trouble.

Pas moyen d'allumer une bougie pour qu'une lueur puisse prier un petit instant. J'ai failli me brûler en tentant de le faire. Les bougies se jettent par brassées dans des braseros géants. La fumée géante se répand sans grâce sur l'esplanade.

Erigée, au dessus des fidèles et même des infidèles, blanche comme les nuages sur fond de ciel bleu, sans tache, à la gloire de l'Immaculée Conception. On est loin du style manuélin, c'est plus sobre. Le pôle d'intérêt doit être ailleurs. A ses pieds, une banderole révèle une inquiétude: la baisse des sacerdoces.

Dans notre remontée vers le nord, nous sommes passés par la Serra da Estrela, le massif montagneux le plus élevé, situé à peu près au centre du Portugal. Avril colore joliment le gris de la pierre en jaune, blanc et mauve, mais hélas également le bleu du ciel en gris, tandis que la DDE portugaise colore les rembardes en vert pour pallier l'absence d'arbres.

Le massif est relativement dénudé avec de gros blocs de granit aux formes variées et soft qui jouent à parodier les bornes kilométriques quasi inexistantes. Au fur et mesure qu'on monte, les nuages se font plus palpables.

La Torre culmine à 1993m et il faisait 2° mais surtout un brouillard épais nous enveloppait, bien humide et qui nous a transis. Il nous tardait d'en sortir surtout que le magnifique panorama vanté sur notre guide se réduisait à pas grand chose. Quelques rares courageux avaient amené leurs enfants faire de la luge. Il fallait arriver dessus pour les voir.

Doucement parce que le roulage se faisait au pas, la pente s'est inversée, et bientôt nous sommes ressortis des nuages. Dès le retour du soleil, sur la première grosse pierre, on a fait comme les lézards. 

Après la montée en zig-zag, la descente tout autant zigzagante. Le thermomètre remontait, la vitesse et le moral aussi. La prise d'angle se faisait plus sûre.

Juste après la Torre en tournant sur la gauche, nous rentrons dans la vallée glaciaire de la Zezere, aux formes caractéristiques. Tout au bout se situe Manteigas. Un calme absolu uniquement brisé par des hèlements de bergers  à l'encontre des insoumises dans leurs troupeaux de chèvres.

Plus au nord coule le Douro. Venant d'Espagne il coule en lacets jusqu'à l'Océan. C'est un grand fleuve très encaissé et chaque tournant de la route peut donner lieu à un miradouro. C'est une belle balade incontournable qui peut se faire également en train ou en bateau. 

Sur chaque berge, la vigne court. C'est son raisin qui sert à faire le fameux Porto dont les Anglais se sont fait très tôt les ambassadeurs. Il y a bien une histoire avec le Marsala, mais qui connaît le Marsala de nos jours?  Le secret du vin de Porto, c'est le sol schisteux qui capte la chaleur de la journée et la restitue doucement tout au long de la nuit, d'après ce que l'on nous a dit. Mais il me semble que cette explication ressort chaque fois qu'on parle de vin.

Les vignes poussent en terrasses, encore et toujours. Quelle vaillance ont ces vignerons. J'ai souvenir qu'au dessus de Collioure dans les Pyrénées Orientales, là où on fait le Banyuls, beaucoup de terrasses étaient laissées à l'abandon, les murettes s'écroulent çà et là. 

Autrefois, les tonneaux descendaient par le fleuve jusqu'à la ville de Porto pour être stockés dans une de ces caves situées sur un quai de la ville. Ces petits bateaux sont là, seulement pour en perpétuer le souvenir. Maintenant c'est par camion-citernes. Mais le procédé de cassage de la fermentation perdure. Tony au gîte d'Amarante m'a fait goûter à l'eau de vie qui sert à cet effet, mon gosier s'en souvient encore.

Cette cave est plus connue au Brésil qu'en France. La visite, fort intéressante, se termine par une dégustation de Portos blancs et rouges. On y apprend qu'au Portugal, on sert le blanc en guise d'apéritif et le rouge en digestif. Le blanc plaît d'emblée, le rouge un peu particulier demande du temps, mais à la fin, c'est le rouge qui nous a le plus plu. 

 

Pour notre dernier lieu d'hébergement, nous étions à la Quinta de Ribas près d'Amarante. La fenêtre de notre gîte donnait sur un oranger. C'est fou ce qu'un oranger peut être généreux. Hélas, Il pleuvait tout le temps et Bom Jesus à côté de Braga était dans le brouillard. On a seulement pu constater que nos tenues de pluie actuelles étaient plus efficaces que celles qu'on avait l'année dernière. Heureusement que le gîte était confortable avec une cheminée qui séchait aussi bien les vêtements qu'elle réchauffait les coeurs. Nous sommes en pleine région du Vinho Verde, excellent sur place; celui qu'on peut acheter en France nous a beaucoup déçu. C'est un vin légèrement pétillant. Tony nous expliquait que c'était naturel à cause d'un cépage qui maintenant se faisait rare et qu'actuellement le pétillant était produit par injection de gaz.

Nos visites se sont terminées à Porto. Une sympathique ville avec somme toute pas mal de choses à découvrir. Tous les guides parlent de l'extraordinaire librairie Lello e Irmao. Attention, depuis peu, Les vendeurs rappellent à tout va qu'il est interdit de prendre des photos. On a assisté à des prises de bec. Il faut dire qu'ils ont fait éditer un petit livre sur leur librairie, on ne l'a pas trouvé en Français. Nous avons procédé comme à Lisbonne: visite de la ville en bus à étage. Quand on a peu de temps, c'est impérial, ce n'est pas fatigant, on s'arrête où on veut, on reprend le circuit quand on veut. Les explications sont suffisantes et entre les explications, du fado encore du fado, toujours du fado.

Porto vue des quais d'en face. C'est joliment coloré. Les maisons sont plus proches de l'eau qu'à Lisbonne au bord du Tage. Le Douro est peut-être moins volubile que ce dernier. On y voit plein de terrasses encombrées de tables et de chaises des différents bistrots. De ce côté, les quais sont comparativement très vides de nos jours. Ils devaient servir de terrain de roulage aux tonneaux.

Outre les moyens de visite qu'on trouve à Lisbonne, il y a en plus, à Porto, les mêmes oeufs qu'on trouve dans nos Pyrénées. Je compare Porto a Lisbonne parce que les 2 villes, vues de haut, ont à peu près la même topographie. Le métro ici, fait plus penser à un tramway car il roule beaucoup à l'extérieur. Il paraît que le nouvel aéroport international, d'un design dernier cri, est à voir.

De beaux bâtiments et un pont à la Eiffel qui relie Porto à Vila Nova de Gaia, où sont situées toutes les caves. Logiquement les bouteilles devraient porter le nom de Vila Nova de Gaia et pas Porto. C'est vrai que le premier nom est moins porteur. Dans certaines caves, on peut goûter jusqu'à 10 sortes de Porto différentes Il y en a qui doivent passer beaucoup de temps de ce côté ci du pont. 

Impressions:

On nous avait dit: attention à la circulation au Portugal; on n'a rien vu de spécial. Ce n'est ni pire ni mieux qu'en France. Beaucoup de panneaux de limitation à 50 sont injustifiés et d'ailleurs personne ne les respecte. La vitesse sur les autoroutes et voies rapides est limitée à 120.

Une chose un peu irritante dans les traversées de villages c'est la présence des feux tricolores de régulation de vitesse. Souvent juste avant que vous arrivez, ils passent au rouge vous obligeant à freiner, rétrograder et quand devant eux, alors que vous venez juste de passer au point mort, malicieusement ils passent au vert. Là également peu de Portugais en font cas.

Nous n'avons pas vu grande circulation sur les routes, à cause du prix des péages, les autoroutes sont désertes. Le prix de l'essence, plus cher qu'en France doit bien dissuader. La présence policière est quasi inexistante. J'ai vu un radar mobile à l'entrée d'une ville, comme en France quelques automobilistes nous ont avertis. 

A Lisbonne et à Porto, nous avons utilisé les transports en commun. C'est bien plus reposant. Dans le métro, il y a des avertissements insistants contre les pickpockets. On n'a pas ressenti de tensions palpables.

Dans la plupart des villages et même des grandes villes, les rues sont pavées et très souvent en pente. Heureusement que les pavés ne sont pas trop glissants. Les grandes routes sont aux normes européennes et le grip est très bon. Sur les petites routes, le macadam est loin d'être parfait mais ce n'est pas pire qu'en France.

Pas beaucoup de touristes en avril et pas beaucoup de motos. A Marvao, nous étions descendus dans le même hôtel qu'un couple de motards Anglais. A Sagres, un autre couple, Espagnols ceux là mais également en R1200RT se sont arrêtés parce qu'ils ont vu notre moto garée. Rien d'autre à part eux. Si, dans une montée bien sinueuse, nous avons vu un groupe de Portugais, des jeunes avec des roadsters. Il y en avait un qui a fait un tout droit. Nous sommes arrivés bien après, les secours étaient déjà là.

Les paysages ne sont pas très dépaysants pour quelqu'un venant de France. sauf peut-être dans le sud avec ces visions de petits villages sur les collines. Beaucoup de maisons sont blanches avec un liseré de bleu soulignant le bas et l'entourage de la porte. Le style manuélin impressionne ainsi que les azulejos.

La cuisine n'appelle pas de remarques particulières, on a seulement découvert le Cataplana, une spécialité du sud. Le plat et le récipient qui sert à la cuisson portent le même nom. Du coup la similitude avec le Tajine marocain se laisse entrevoir. Le Cataplana avec du Vinho Verde, c'est un must, il faut savoir attendre car la cuisson est un peu longue. Dans les petits restos, le plat du jour copieux est souvent entre 4 et 5 Euros. Dans les grandes villes, le repas complet est au même prix qu'en France. Dès qu'on s'asseoit, le serveur pose sur la table des genres de Tapas, il paraît que si on les consomme, la facture est salée, on n'a pas vérifié.

Avril n'est pas un joli mois pour faire du tourisme à moto, mais nous ne pouvons pas encore choisir les dates de nos vacances. Il ne faut pas oublier ses tenues de pluie.

Au Portugal comme en Espagne, ils ont beaucoup investi dans l'éolien. On peut voir partout dans le pays, ces grandes pales tournoyant mollement. 

On nous a dit que les Portugais parlent tous le Français, nous on ne l'a pas remarqué.

On reviendra au Portugal, ce sera pour les soirées Fado et la vallée du Douro.

 

Lieux d'hébergements:

Tous les hôtels disposaient d'un parking privé pour la moto. Pour Lisbonne et Coimbra c'était avec un supplément. Pour Marvao, le parking public était suffisant vu le lieu, mais l'hôtelier pouvait mettre la moto en sécurité dans un garage situé un peu loin de l'hôtel. Sauf à Miranda qui a servi d'hôtel de passage, les autres nous servaient de base arrière pour des excursions plus ou moins éloignées. Les petits déjeuners étaient inclus.

 

Miranda de Ebro: Hôtel Hotel-and-Go Miranda   Plataforma Logistica Arasur, Avenida Alava, 1, 01213 Ribabellosa  (Très bien, très spacieux, très clean, très bon rapport qualité/prix. Situation difficile à trouver)

Marvao:  Hôtel Dom Dinis   Rua Dr. Matos Magalhães, 7, 7330-121 Marvão (Hôtel de charme dans un cadre enchanteur, les hôteliers sont sympathiques et parlent correctement le français, notre coup de coeur)

Sagres:  Hôtel Don Tenório Aparthotel  8650-365 Sagres  (Prix défiant toute concurrence. Pour un séjour court et hors saison car l'insonorisation est légère)

Lisbonne:  Hôtel do Chile Rua Antonio Pedro nº 40, 1000.039 Lisbonne (Bien situé, près station de métro, bien insonorisé, un peu ancien mais très très correct. Le garage n'est pas sous l'hôtel)

Coimbra:  Hôtel Ibis Avenida Emidio Navarro, Nº 70, 3000-150 Coimbra (Bien situé, près des lieux de visite, très clean, Les petit-déjeuners sont copieux et variés. Les bruits des voitures dans la rue sont trop présents)

Amarante: Gîte Quinta de Ribas, Vila Cha 4600-801 Amarante (situé en dehors de la ville, très calme, beaucoup d'espace, familial, Catherine et Tony reçoivent chaleureusement en Français. Les petits-déjeuners ne sont pas très variés.)

 

* Voyage de 4652Kms, 15 jours, Avril 2012, K1200GT en duo.

Pour voyager, par rapport à une Pan1300, la K1200GT est moins confortable. Le rythme tourisme tranquille dans les petits coins perdus lui sied moins, mais c'est quand même une sacrée moto-GT. Certains disent que les BM consomment de l'huile, ce n'est pas le cas avec la K1200GT, l'emport d'huile n'est pas utile, un peu plus de place disponible pour les bagages, mais c'est pareil pour la Pan1300.

 

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